Le bâton de marche

17.8.03

 

Foules Eclair ? Vous avez dit Flashmobs ?

Réunir des dizaines de personnes dans la ville, on connait. Des manifs, à Paris, il y en a tous les jours ou presque (hors vacances scolaires, bien sûr...). L'abondance nationale de revendications "manifestables" banalise ces foules. On ne prend plus vraiment le temps de s'inquiéter de leur raison. On se concentre sur le résultat, la manière dont elles nous touchent quotidiennement : sorties de métro fermées, bouchons, transports en commun bondés car restreints...
Seulement, les FouleEclair n'ont pas de raison particulière justifiant cette réunion. C'est absurde et inutile. Un peu dingue. Comme l'art, en quelque sorte. Une "performance" ?
Retrouver de manière coordonnée des dizaines de personnes que l'on ne connait pas, partager un instant de surprise avec elles, c'est oublier l'espace de ce moment qu'aujourd'hui, on n'agit rarement sans raison. Ce n'est pas bon pour l'économie. Ce n'est pas "raisonnable". Ce n'est pas justifiable. Ce n'est pas prévu par la loi.
Refus de l'emprise de la Machine ?

Créer la surprise : c'est peut être là leur intérêt. Voire leur raison. Surprise du quidam pris malgré lui dans l'affaire. Surprise des spectateurs. Surprise des participants, peut être aussi ? Surprise des médias, l'évènement échappant, théoriquement, par définition, à leurs yeux multiples et inquisiteurs (ou du moins selon moi). Surprise des "autorités" : "comment, aucune revendication ?".
Seulement, la manière dont semblent être conduites les prochaines foules éclairs me font douter : est ce que proposer une page internet à la vue de tous et une inscription via cette page est le meilleur moyen d'arriver à cette surprise ? J'y avais vu tout d'abord un moyen de respecter l'anonymat des participants. Seulement, l'évènement ayant été repoussé (faute de participants ?), tout le monde peut être au courant bien avant la réalisation.
Si la chose est sue de tous avant même son accomplissement, ça ne me donne plus vraiment envie d'y participer. Quel intérêt ? Caméras, journaleux et encadrants casqués seront sur place pour rapporter l'évènement, le présenter aux profanes, le canaliser et éviter tout débordement. Si la scène est couverte par un journal ou une télé, si elle est infiltrée ou encadrée par la police, alors peut on encore parler de flashmob ? De mon point de vue, la foule éclair pourra être considérée comme manquée.

Et cela pourrait être pire encore. Car bien qu'on aime taper dessus, les media et les flics ne sont pas là pour nuire. Laisser l'information disponible de manière prolongée augmente les probabilités de tentatives de récupération, l'éventualité de la présence de casseurs, etc.
De ce point de vue, il semblerait que l'organisation de ces flashmobs françaises soit à revoir. Une organisation plus serrée me semble impérative. Et la coordination par sms plus efficace. Reste à savoir si je laisserai mon numéro à des inconnus.

Enfin, maintenant que la question est abordée au journal télévisé, on peut se demander s'il existe un avenir pour ce type de flashmob. Quelqu'un a dit que le verlan est mort le jour où Yves Mourousi a demandé à Mitterrand s'il était "chébran" au 20h. Est ce le sort annoncé des foules éclair ? Si tout le monde sait ce que c'est, quel est l'intérêt de continuer ? Ca ne sera plus juste "absurde et inutile". Ca deviendrait un passe temps connu de tous, au même titre que le jardinage, l'aïkido, ou la belote. En un peu plus débile.