Le bâton de marche

23.7.03

 

Parlez vous français ?

Débat sur la langue dans la Blogosphère (enfin, dans la mienne). Tout est parti du fait que dorénavant, dans les documents officiels de la République, il est recommandé d'employer l'astucieux "courriel" en lieu et place de l'anglophone "e-mail".

On peut déjà se demander si cela signifie, comme veulent le penser les minables francophobes, que tout citoyen français a dorénavant ordre d'utiliser un mot québecois à la place d'un mot anglosaxon... Il ne me semble pas.
Donc Mouche affirme qu'elle ne changera pas ses habitudes (dans un billet supprimé sur L'Oeil de Mouche), et de là, Neige fulmine contre l'utilisation de l'anglais dans les weblogs francophones : tous ces petits termes qui parsèment nos écrits simplement parce qu'ils sont ceux que l'on utilise généralement. On ne réfléchit pas plus que ça au fait que tel ou tel soit d'origine anglaise (à partir du moment ou un terme est utilisé courramment dans le langage, peut on encore dire qu'il n'est pas de cette langue ?) et donc hop... on l'emploie.

Oui, l'attitude "speaking english is cool" pue des pieds, à mon sens. Mais employer un terme d'origine anglaise ne me dérange personnellement pas plus que ça. N'y a t'il pas beaucoup de termes d'origine française dans la langue anglaise ? [mail viendrait du français malle, le courrier étant autrefois acheminé par la "malle poste"] Et dans bien d'autres langues également (euh... enfin, il me semble) ? Et franchement, si les québecois s'écoutent parler, ils utilisent tous autant que nous des termes "étrangers" (intéressons nous deux secondes au vocabulaire de la Belle Province lié à la voiture, par exemple). Nous ne les employons pas dans les même domaines, c'est tout (et b*rdel, qu'on arrête de nous ressasser "shopping"... qui emploie aujourd'hui réellement ce mot de manière courante ?).
Une langue qui vit repliée sur elle même n'est elle pas une langue qui se prépare à mourir ? Et à l'inverse, une langue vivante n'est donc pas une langue qui n'hésite pas à macrophager ses consoeurs ?

Je ne nie pas la richesse du vocabulaire français. Bien sûr, je n'ai pas toutes les connaissances nécessaires et donc je peux me tromper ("non, vous n'êtes pas nuls, vous êtes jeunes" nous disait mon prof de physique en Deug). Seulement, il me semble (est ce erroné ?) que jusqu'à présent, notre langue s'est construite en empruntant à droite à gauche les termes qu'elle ne possédait pas, où qui permettaient de dire "plus vite" certaines choses. Alors quel est le problème si on continue de même ?
Est ce que ça ne s'apparenterait pas à des raisonnements qui sentent très mauvais, ce genre d'idées ? C'est un peu intégriste quand même...
J'aimerai savoir comment ça se passe pour les langues allemande, espagnole, néerlandaise, etc. Ont ils le même genre de débats ? Do spanish people, german people, etc, debate on the use of english terms ?

Bien sûr, la situation n'est pas la même au Québec. De par leur situation géographique ou leur histoire, ils n'ont pas les même raisons que nous de s'attacher au français.
Mais qui pense en France que notre langue est menacée par l'anglais ? Elle l'est sûrement plus par les carences en grammaire, en orthographe ou le "langage sms" des djeun'z : méta langage ou pas, un aperçu de copies de collégiens m'effraie plus que la publication scientifique hexagonale (à ce sujet, il faudrait se mettre un peu à la place des chercheurs: s'ils publient en français, c'est bien joli, mais il n'y aura aucun écho, suivi, retour, reconnaissance... dans la sphère anglophone, mais également dans tous les pays qui ne pratiquent pas le français, comme par exemple le Japon ou la Chine - demander des publications dans les deux langues me semble plus "utile"). Jusqu'à preuve du contraire, les personnes qui suivent des études supérieures - et qui sont donc amenées à s'exprimer le plus correctement possible - ne représentent pas la majorité de la population...
L'utilisation de termes "étrangers" traduit peut être simplement le fait que nous avons en France, dans certains domaines, un retard technologique. La France n'a pas le monopole de la culture et de la technologie, il faut arrêter de s'examiner le nombril.

Pensez vous que notre langue française était la même il y a quelques siècles ? Les technologies évoluant aujourd'hui plus vite, les rapports entre les peuples et les langues étant plus faciles et plus fréquents [note pour moi même: penser à approfondir le rapport franco-suédois], il est naturel que notre langue évolue plus vite qu'auparavant. Freiner des quatre fers n'y changera rien. Dans 50 ans, le français présentera autant de différences, sinon plus, avec celui d'aujourd'hui qu'il y en a maintenant avec celui de Rabelais. Et l'étape suivante sera peut être sa disparition pure et simple. Est ce un bien ? Bien sûr que non. Mais ca n'est pas non plus un mal. C'est l'histoire des langues que d'être pratiquées tant qu'elles sont utiles.